La magie de l'art est d'élever l'âme


Véronique Lechevallier

Lionel Descamps
Vice-président de l'Association Premiers Plans



Vice-président de l’Association Premiers Plans, Lionel Descamps l’est par intermittence : il a quitté cette fonction le temps de son mandat électoral et est revenu en 1995.

Faisant sienne l’idée de Malraux que « le ministère chargé des affaires culturelles a pour mission de rendre accessible les œuvres capitales de l’humanité… au plus grand nombre possible…» et persuadé que la culture a une fonction sociale, son attachement à Premiers Plans tient en trois points : le meilleur pour tous quelle que soit la branche de l’action culturelle, la nécessité d’une action pédagogique visant à éveiller à la fois la curiosité et la sensibilité des plus jeunes et le partage, avec en corollaire, une aide financière. Il crée avec Hervé Carré la charte Culture et Solidarité.

Des différents arts, c’est le cinéma qui remplit mieux ce rôle. Il a cet avantage d’être spontanément populaire. Il permet de s’évader du quotidien : la séance est une parenthèse qu’on ouvre en entrant dans la salle et qu’on referme deux heures plus tard enrichi d’un voyage dans un monde imaginaire ou d’une confrontation à une autre réalité que la sienne.

Enfant, le théâtre l’attirait plus que le cinéma. S’il se souvient encore de poèmes ou de tirades de Cyrano de Bergerac, il ne se souvient pas du premier film vu au ciné-club du Roi-René. Et ce n’est pas tant un film ou un événement qui l’ont marqué à Premiers Plans - ou alors il y en aurait beaucoup – que le travail de toute une équipe au service d’une rencontre entre le public, les jeunes en particulier, et les cinéastes. La vertu de ce festival est d’avoir su créer un lieu « où ceux qui font du cinéma sont à la disposition de ceux qui aiment le cinéma ».

Son rôle à lui se résume, « à faire valoir son point de vue sur les orientations », point de vue qu’il a pu se forger patiemment à la lumière de sa propre expérience et de celle des artistes qui savent si bien lui communiquer leur vision du monde. Mais pas question de lui dicter le chemin à prendre, comme les jésuites avaient tenté de le faire, pas question de le saturer de sons, de musique et d’images !

Il veut juste ressentir une émotion, celle qui nous dépasse et nous donne « l’impression de passer d’une humanité à une autre ».

C’est celle qu’il avait, enfant, au contact de la nature, goûtant de la liberté dans le jardin de sa grand-mère ou marchant dans la montagne aux cotés de ses oncles moines, communiant avec eux dans la solitude, la réflexion et le silence.

La Grande Chartreuse
C’est l’excitation des sens qu’il éprouvait quand il chantait à la messe et que l’orgue résonnait, le frisson provoqué par la fragilité cristalline de ces voix d’enfants, le rai de lumière dans une chapelle baroque, la pureté d’une arche de l’abbaye de Fontevraud, la note répétitive d’une musique ethnique, la puissance d’un mot, le trait stylisé d’un dessin ou le plan fixe sur un visage filmé par Xavier Beauvois.

 "Les gardiennes"                         bande annonce

Il en garde un goût pour l’épure qui confine au sacré.

 dessin de Lionel Descamps
Lui qui a la « chance d’être », veut partager dans un échange permanent le mystère de l’acte créatif, rendre ce qu’il a reçu. Si « la magie de l’art » est d’élever l’âme alors que ce soit l'âme de tous, c'est son credo. 

Et c’est le cinéma qui permet ça. 


Arvo Pärt Spiegel im Spiegel




Colette Baillou