S'autoriser à faire rire à étonner



Jean Bauné
Secrétaire du conseil d’administration de Premiers Plans



Ses premières émotions liées au cinéma : Narcisse de Ayres d’Aguiar avec Rellys alors qu’il avait 5 ans, film drôle d’un aventurier aviateur, au cinéma de Mazé et Autant en emporte le vent de Victor Fleming à l’âge de 9 ans à Beaufort en Vallée.



Mais plus que le cinéma c’est le théâtre qui anime sa vie et c’est par le théâtre qu’il est arrivé à Premiers Plans. Par le biais de la maison de la culture d’Angers (1968/1972), c’est là qu’il a connu Claude-Eric Poiroux, puis participé à l’achat du cinéma « Le Club », la création de l’association Cinéma Parlant et s’est engagé dans l’aventure de Premiers Plans où depuis sa création il occupe le poste de secrétaire.

Pourquoi le théâtre ? Enfant, il assistait aux représentations théâtrales données dans les villages de sa campagne natale où laïcs et patronages rivalisaient. Il était fasciné par les masques et les costumes et se rappelle les mardis gras où il se déguisait avec ses amis pour parcourir la campagne. Au collège à 15 ans, un professeur emmène sa classe assister à la représentation de la pièce de Luigi Pirandello A chacun sa vérité interprété par la Comédie Française dont le compte rendu lui vaut une note excellente.

A chacun sa vérité, Théâtre Passé Présent

À l’Ecole Normale, il participe à l’atelier théâtre de la Fédération des œuvres laïques et milite au sein des CEMEA (centres d’entraînement aux méthodes d’éducation active). Les rencontres au sein de ces mouvements d’éducation populaire seront déterminantes : il enseignera le français à des collégiens en y intégrant le théâtre et le cinéma. 

Comment être acteur et, ou spectateur. Comment faire l’apprentissage du regard de celui qui voit, est vu, ou se donne à voir. Son désir est de faire accéder les jeunes, surtout ceux des classes populaires, aux émotions et au plaisir que lui-même a rencontrés au théâtre, surtout dans le travail d’improvisation et de jeu dramatique. Jouer du théâtre, c’est un peu comme une psychanalyse à dose homéopathique : découvrir ce qu’on ne soupçonne pas de sa propre personnalité et l’accepter, trouver sa place, dire à travers le personnage ce qu’on n’arrive pas à dire soi-même, se libérer de ce qui nous encombre, se connaitre et surtout s’autoriser à. S’autoriser à faire rire, à étonner, voire même à jouer dans des spectacles Gore un personnage qui meurt et crache le sang, ce qui lui rappelle son grand père charcutier qu’il aimait aider à tuer le cochon. Ce souvenir le ramène à son enfance, à la fascination et à la honte d’une transgression d’un dimanche après-midi où lui-même fils du maire laïc de sa commune s’est retrouvé au premier rang du patronage assister à la représentation des Misérables de Victor Hugo où Jean Valjean était interprété par une célébrité locale Emile Joulain.

Au festival Premiers Plans c’est la lecture de scénario qu’il préfère, se faire son propre cinéma à partir de la présence et de la voix des comédiens.

Un souvenir du festival : Jeanne Moreau et sa lecture du dernier scénario de Pasolini Porno-Teo-Kolossal, une performance d’actrice. Des films : Sarabande d’Ingmar Bergman ou encore la rétrospective d’Andrey Zvyagintsev, un cinéma très lent qui traite des rapports violents entre adultes et enfants, un cinéma qui dénonce l’incommunicabilité entre les êtres et le manque d’amour. Ce peut-être contre quoi il a lutté toute sa vie d’enseignant et encore aujourd'hui dans son rôle de militant pour le théâtre-éducation.



Sarabande

                                                                                                                                                                               
Faute d'amour


Dominique Fraboulet